Articles de la semaine

« BIG DATA » ET L’analytique EN PÉDIATRIE

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Cet article de revue offre une perspective sur l’apport de l’analyse du grand volume de données générées par les soins de santé informatisés, dans le contexte de la pédiatrie.

La définition de l’analytique (analytics) offerte par l’auteur est l’analyse systématique de données, combinée à des facteurs qualitatifs et quantitatifs, pour aider à la prise de décisions. Évidemment, avec l’arrivée des dossiers médicaux électroniques, de l’appareillage médical connecté, et l’augmentation de la puissance des ordinateurs, le système de santé, et même l’industrie de la santé dans son ensemble, n’échappera pas à cette tendance.

L’auteur présente quelques réflexions sur ce sujet:

  • L’aide à la décision est une forme primitive d’analytique; en particulier les systèmes basés sur des règles pour alerter les cliniciens semblent avoir un effet bénéfique lorsque bien exécutées. Un exemple donné est un indice de détérioration des patients combiné à une alerte électronique mis en place dans un dossier électronique.
  • Plus avancés sont les systèmes de suivi de la performance pour des problèmes de santé, des clientèles, des unités de soins, des hôpitaux ou des situations cliniques particulières (par exemple les réadmissions). Des exemples sont donnés dans l’article, par exemple un tableau de bord pour suivre les soins offerts pour les appendicites, ou encore pour l’état de santé de la population desservie par un hôpital.
  • Les organisations de santé devront se doter d’une architecture permettant de supporter l’analytique, notamment des banques de données et de l’espace pour stocker toute cette information. Le filtrage, le tri et l’analyse des données demanderont des technologies particulières et du personnel formé pour effectuer cela de manière adéquate.
  • Une autre application évidente est la génomique, et l’analyse des immenses ensembles de données générés par l’analyse de génomes.

L’article termine en parlant du développement d’une spécialisation médicale en informatique clinique. Comme je l’ai déjà mentionné dans le passé, je suis convaincu qu’une spécialisation en informatique clinique au niveau de la pharmacie verra également le jour, car la pratique de la pharmacie n’échappera pas à l’informatisation de la santé.

CANADA, ADOPTION DES DOSSIERS MÉDICAUX ÉLECTRONIQUES

Cet article a été écrit par deux auteurs pharmaciens, mais parle de l’adoption des dossiers médicaux électroniques par les médecins, on comprend qu’on parle surtout de pratique en communauté (primary care). L’article est disponible en texte complet gratuitement sur PubMed Central. L’objectif était de décrire l’état d’adoption des dossiers électroniques au Canada, ce qui recoupe un autre article dont j’ai déjà parlé (mais il n’est pas cité…)

Les auteurs ont effectué une revue de littérature médicale combinée à une recherche de littérature grise (les sites web des provinces, ainsi que des organismes fédéraux incluant Inforoute Santé du Canada. 12 articles ont été retrouvés dans la littérature médicale, le reste des données provient de la littérature grise.

En 2012-2013, le Québec semblait être en dernière ou avant-dernière place (derrière l’Île-du-Prince-Édouard), avec un taux d’adoption autour de 30 à 40%. Comparativement, la moyenne canadienne était autour de 60% (selon l’autre article mentionné plus haut, c’était 77% en 2014, ce qui semble cohérent).

Parmi les barrières à l’adoption des dossiers électroniques notés dans cet article, on note le manque de formation à l’usage de cette technologie, le manque de compréhension des capacités des logiciels et l’interopérabilité déficiente, par exemple la nécessité d’envoyer des prescriptions par fax, ou de numériser des consultations ou des rapports de laboratoire dans le système.

À propos de la prescription électronique dans de tels systèmes, on mentionne que le Canada est 7ème sur 10 avec une moyenne de 43% des médecins qui utilisent cette technologie, comparativement à 98% aux Pays-Bas et 77% en Allemagne. Étrangement, l’article mentionne que seul le Québec permet la transmission électronique d’ordonnances vers les pharmacies, ce qui ne me semble pas être la réalité actuelle, bien que ça semble être théoriquement possible selon un article que j’ai mentionné en novembre dernier. En fait, selon une entrevue sur la prescription électronique diffusée récemment sur la Première Chaîne de Radio-Canada, l’infrastructure de transmission électronique serait en place.

Il semble donc que bien qu’on soit un peu en retard, on avance dans la bonne direction !

Royaume-Uni, indicateurs d’erreurs de prescription en pédiatrie

Cet article, d’auteurs pharmaciens, visait à établir une liste d’indicateurs d’erreurs de prescription dans le contexte de la prescription électronique dans un hôpital pédiatrique. Une approche Delphi a été employée.

D’abord, un panel d’experts pédiatres et pharmaciens en pédiatrie a été constitué, avec 24 personnes, dont 21 ont collaboré jusqu’au bout (8 pharmaciens, 13 pédiatres). Une revue de la littérature a été menée pour identifier les indicateurs soumis au panélistes pour révision, soit:

  • Les publications similaires en pratique adulte
  • La littérature spécifique à la pédiatrie
  • Les données des systèmes de déclaration nationaux au Royaume-Uni
  • Les données des pharmacies et établissements participant au projet
  • Les alertes nationales

Les panélistes pouvaient également soumettre des indicateurs pour inclusion dans l’évaluation. Les critères inclus devaient refléter une vraie erreur de prescription, et non une erreur de préparation, de sélection de médicament ou d’administration. En fait, les critères ainsi établis avaient pour objectif de servir à évaluer si les systèmes de prescription électronique permettaient de diminuer les erreurs ayant une réelle capacité de causer des événements indésirables atteignant le patient, pas seulement des erreurs inconséquentielles. À chaque ronde, les indicateurs ont été cotés selon la probabilité que l’erreur se produise et les conséquences de celle-ci, à partir d’une matrice à 2 dimensions (probabilité-sévérité).

Après deux rondes, 179 indicateurs ont été évalués pour aboutir à une liste finale de 41 indicateurs. Pour chaque indicateur, le détail de l’erreur, des conséquences possibles, du type d’erreur et du niveau de consensus sont présentés.

En lisant la liste, je dois dire que je suis plutôt d’accord que ce qui est proposé a une importance clinique réelle. C’est d’ailleurs d’actualité: un rapport récent du groupe Leapfrog aux États-Unis affirme que les systèmes de prescription électronique laissent passer des erreurs graves. Ce rapport a d’ailleurs été assez médiatisé. Cependant, ce que je ne vois pas dans la méthode de l’évaluation du groupe Leapfrog, c’est quels autres systèmes étaient en place dans les établissements évalués pour intercepter les erreurs à part le système de prescription électronique. Et il s’agit d’une simulation, on ne dit pas si les erreurs ainsi simulées se sont produites réellement. Bien sûr, ce n’est pas une excuse, les fonctionnalités d’aide à la décision devraient être activées et adéquates dans les logiciels de prescription électronique, mais c’est beaucoup plus facile d’évaluer un seul système pris isolément, surtout en simulation, que d’évaluer l’ensemble des mesures de sécurité mises en place à travers tout le circuit du médicament.

On sait que le taux d’erreurs graves qui se rendent au patient dans les établissements de santé est assez bas. Bien sûr, les erreurs non interceptées peuvent être lourdes de conséquences, et c’est pourquoi toutes sortes de processus sont mis en place pour intercepter les erreurs à diverses étapes, que l’on pense à la présence de pharmaciens sur les unités de soins, à la validation pharmaceutique centralisée et l’administration des médicaments assisté par code-barre. En terme d’évaluation de l’efficacité de ces systèmes, il est plus facile de suivre les erreurs de toutes sévérités interceptées à une ou plusieurs étapes, que de suivre les erreurs non interceptées, puisque celles-ci sont moins nombreuses. C’est pourquoi on voit souvent des études où on parle d’erreurs interceptées, où la majorité sont de sévérité mineure. Si on voulait faire une étude avec les indicateurs proposés dans cette étude, il faudrait que l’étude soit très longue, ou qu’elle soit faite dans un grand nombre d’hôpitaux, pour attraper assez d’erreurs pour que les données veulent dire quelque chose.

Crédit image: kentoh / 123RF Stock Photo

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