J’ai parlé récemment d’un article provenant du Royaume-Uni à propos d’indicateurs d’erreurs de prescription en pédiatrie, paru au début avril dans le British Journal of Clinical Pharmacology.
Un article français sur le même thème est aussi paru au début avril, dans la revue Archives de Pédiatrie (déclaration de conflit d’intérêt: je connais certains des auteurs).
Le projet décrit dans cet article avait pour objectif d’établir une liste de prescriptions inappropriées et de prescriptions à ne pas omettre (appelée POPI) dans une population pédiatrique, en fonction de divers problèmes de santé. L’approche est similaire à la liste de Beers pour les personnes âgées, mais surtout aux listes STOPP/START utilisées elles aussi chez les personnes âgées.
Une liste de pathologies fréquentes a été établie à partir de deux banques de données, une en milieu hospitalier et l’autre en milieu communautaire. Pour les problèmes de santé ainsi identifiés, une revue de littérature, incluant les recommandations d’instances nationales et de sociétés savantes, de même que diverses banques de données, a été menée afin d’en extraire les recommandations. Celles-ci ont été classées en « prescriptions inappropriées » et « omissions de prescription » qui représenteraient des erreurs.
Un panel d’experts a été constitué avec 8 pharmaciens et 8 médecins, la moitié en pratique hospitalière et l’autre moitié en pratique communautaire. Ceux-ci ont coté les recommandations selon une approche Delphi à deux tours, afin d’obtenir un consensus. La liste finale, présentée dans l’article, comporte 101 recommandations.
Les auteurs soulignent que d’autres travaux sont en cours pour évaluer et valider l’outil de manière prospective et multicentrique, notamment pour déterminer l’impact en pratique sur les prescriptions inappropriées. L’intention est que cette liste soit disponible pour l’ensemble des intervenants impliqués dans la prescription et la validation d’ordonnances chez les enfants, par exemple à l’aide de feuillets en format poche, d’un outil sur téléphone intelligent, ou d’une application disponible sur les ordinateurs utilisés pour rédiger ou valider des ordonnances.
En lisant les recommandations, il est clair que celles-ci sont très liées aux produits disponibles en France, un travail d’adaptation serait nécessaire pour l’utiliser au Québec et au Canada, néanmoins je crois que la plupart des recommandations trouveraient des équivalents dans la pharmacopée nord-américaine.
Lors que je compare l’outil britannique et l’outil français, je dois dire que l’outil britannique me semble beaucoup plus focalisé sur la pratique en soins hospitaliers aigus, tandis que l’outil français m’apparaît avoir une plus grande applicabilité dans la pratique communautaire. Néanmoins, certaines recommandations des deux outils seraient applicables aux deux pratiques. Le titre de l’article britannique comporte d’ailleurs les mots « hospital prescribing indicators« . Il ne me semble pas que ces deux outils soient en compétition, mais plutôt qu’ils se complémentent.
À titre d’exemples, voici deux recommandations tirées de chaque outil:
Outil britannique:
- Prescribing of intravenous heparin infusion for treatment of thromboembolic event using the wrong dose or infusion rate based on local protocol (risk of toxicity or therapeutic failure).
- Meropenem prescribed at a dose of 20mg/kg instead of 40mg/kg for meningitis or respiratory exacerbation of CF (potential under treatment).
Outil POPI:
- Infections ORL: Antibiotique autre que l’amoxicilline en 1re intention en cas d’otite moyenne aiguë, angine à streptocoque A, sinusite (à dose efficace sur le pneumocoque soit 80-90 mg/kg et sur le streptocoque soit 50 mg/kg) en l’absence d’allergie.
- Fièvre et douleur: Association de deux AINS.
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