La saisie et la validation des ordonnances à la pharmacie d’un établissement de santé requiert régulièrement des appels aux infirmières et aux médecins afin d’obtenir des précisions sur des ordonnances mal écrites, ou dont les instructions sont contradictoires ou ambigues. Dans le contexte de la prescription électronique, les appels pour illisibilité sont (en théorie) éliminés, mais il demeure que les instructions inscrites, même en électronique, peuvent requérir des clarifications. Il peut aussi être nécessaire d’obtenir d’autres informations qui ne sont pas nécessairement incluses dans l’ordonnance comme le poids, la taille ou les allergies d’un patient. Dans le cas où des pharmaciens sont présents sur les unités de soins, les appels peuvent être dirigés vers eux afin de faciliter l’obtention de l’information, mais ce n’est pas toujours possible.
Une étude publiée récemment s’est intéressée à ce problème. Elle avait pour objectif d’évaluer l’impact de l’ajout d’alertes dynamiques lors de la prescription électronique sur le nombre d’appels requis pour clarifier les ordonnances à la pharmacie.
Dans un centre hospitalier et ses cliniques affiliées située au Mississippi, utilisant un dossier électronique commercial, des alertes ont été ajoutées permettant d’aviser le prescripteur au moment même où il rédige l’ordonnance lorsque:
- Le prescripteur n’était pas indiqué.
- La pharmacie n’était pas indiquée.
- Les spécifications pour les ordonnances de médicament contrôlés n’étaient pas rencontrées.
- Les instructions pour l’administration ou pour les données patient étaient trop longues ou fractionnées.
- Les instuctions étaient à la fois entrées en champs granulaires et en texte libre.
On voit qu’il s’agit ici d’une validation technique plutôt que clinique, mais j’ose imaginer, même si ce n’est pas clairement indiqué, que les appels pour clarification en pré-intervention étaient souvent réalisés pour ces éléments. 9 mois de données de prescription ont été extraites en pré et en post intervention, puis, en fonction d’un calcul de puissance, 301 ordonnances en pré et 301 en post ont été sélectionnées aléatoirement. Un pharmacien et une infirmière ont révisé ces prescriptions pour déterminer si un appel de clarification aurait été nécessaire. À noter, il ne s’agit donc pas ici d’un dénombrement des appels réellement effectués. Un calcul de coûts en fonction du salaire des intervenants impliqués à aussi été effectué.
En pré intervention, 61 ordonnances sur 301 (20,3%) auraient généré un appel contre 39 sur 301 (13,0%) en post, une différence significative. Cette réduction du nombre d’appels était associée à des coûts en temps épargné de 76$ par tranche de 100 ordonnances.
L’article a évidemment plusieurs limites. Personnellement, les éléments de validation technique ajoutés me semblent être surtout liés à une mauvaise fonctionnalité du système de prescription électronique. Dans les systèmes que j’ai vus en pratique, les problèmes de sauts de ligne et de longueur de champs ne sont pas fréquents. Cependant, dépendamment des systèmes, l’absence de nom de prescripteur et les instructions en texte libre qui sont ambigues ou qui discordent avec les champs granulaires sont assez fréquents.
En ce sens, je trouve qu’il s’agit d’un bon article sur une problématique pour laquelle les données manquent. La plupart de la littérature citée par les auteurs provient des pharmacies communautaires, et les différences en validation d’ordonnances par rapport à la pratique en établissement me font douter de la généralisation de ces données.
Il y a donc ici une opportunité pour mieux quantifier ce problème en établissement de santé, et en particulier dans un contexte de prescription à la main ou avec divers systèmes et modèles de pratique.