Une étude sur la posologie structurée en prescription électronique communautaire

Alors que les terminologies décrivant les médicaments (ex.: RxNorm aux États-Unis, CCDD au Canada) sont assez bien connues et utilisées pour la transmission de prescriptions électroniques en milieu communautaire, les éléments de description de la posologie font l’objet de plus de variabilité. Par exemple, au Québec, le DSQ reçoit les posologies de la part des logiciels de pharmacie communautaire sous forme de texte libre, ce qui a pour effet qu’une seule et même posologie peut être exprimée d’une variété de manières.

Une étude est parue en octobre dans JAMIA sur le sujet. Alors que les prescriptions émises dans les logiciels de prescription en établissement sont en général rédigées avec une posologie structurée, aux États-Unis, les instructions posologiques contenues dans les prescriptions électroniques peuvent être structurées ou en texte libre. Un standard américain existe pour les ordonnances destinées au milieu communautaire, le NCPDP SCRIPT, mais l’utilisation des champs structurés n’est pas obligatoire. Ce standard utilise entre autres la terminologie SNOMED CT. Selon l’introduction de l’article, en 2020, environ 11% des ordonnances électroniques transmises aux pharmacies communautaires américaines utilisaient ce standard. L’objectif de l’étude était de déterminer l’étendue d’utilisation du standard dans un jeu de données de prescriptions électroniques provenant d’une entreprise gérant la transmission de prescriptions. Ensuite, les chercheurs souhaitaient comparer les instructions en texte libre aux éléments de données codifiés selon le standard dans les prescriptions, afin d’identifier les enjeux de qualité dans les prescriptions. En effet, des instructions en texte libre discordantes par rapport aux éléments de données granulaires codifiés dans la posologie, ou des éléments de posologie structurée illogiques, indiquent une prescription ambiguë ou contradictoire, à risque d’erreur.

Les auteurs ont obtenu un jeu de données provenant de 12 logiciels de prescription électronique couvrant 31 326 lieux de prescription aux États-Unis entre 2019 et 2021, pour un total de total 3 819 940 prescriptions électroniques. Ils ont identifié les prescriptions comportant des instructions structurées, et ont analysé les directives résultantes à l’aide d’un modèle de traitement du langage appelé Med7 afin de déterminer les doses, formes pharmaceutiques, voies d’administration, fréquences et durées des prescriptions. Au final, 32,4% des prescriptions comportaient au moins une composante de la posologie dans un format structuré.

Diverses analyses ont été réalisées pour déterminer la progression de l’utilisation de la posologie structurée à travers la période couverte par le jeu de données. Les auteurs ont aussi réalisé une comparaison de la prévalence de chaque composante des instructions posologiques entre les prescriptions rédigées directement en texte libre par rapport à celles rédigées de manière structurée.

Les enjeux identifiés dans les éléments de posologie structurée ont été évalués et catégorisés. Cette section est très intéressante. On constate assez clairement que l’utilisation d’une posologie structurée ne prévient pas les ordonnances ambiguës ou illogiques. Citons par exemple:

  • Des ordonnances sans arrondissement (ex.: 975 mg = 30.4688 mL)
  • Des ordonnances pour lesquelles le calcul d’équivalence entre la dose et les formes pharmaceutiques était mal fait (ex.: 1000 mg = 1000 comprimés)
  • Des ordonnances où l’expression de fractions était mal calculée (ex: 11/2 comprimés = 5,5 comprimés plutôt que 1 1/2 comprimé soit 1,5 comprimé)
  • Des ordonnances avec une dose illogique (ex.: appliquer une demi petite quantité)
  • Des discordances entre les données structurées et le texte (ex.: texte dit « qd », mais la donnée structurée dit « qid »)

Les auteurs proposent des stratégies d’amélioration dans la discussion. Je vous invite à lire le texte complet si le sujet vous intéresse. Je retiens de cet article que l’utilisation d’une posologie structurée à des fins de transmission électronique des prescriptions en milieu communautaire n’aboutit pas automatiquement en des prescriptions de qualité. Comme en milieu hospitalier, deux enjeux majeurs sont les discordances entre le texte libre et les champs structurés, ainsi que les instructions ambiguës ou illogiques dans les champs structurés.

Une réflexion sur “Une étude sur la posologie structurée en prescription électronique communautaire

  1. Merci Maxime pour cet article. Je partage ta conclusion. Il y a plusieurs défis dans l’implantation d’une posologie structurée, notamment trouver le bon modèle de données et surtout s’assurer que la saisie le respecte. La phrase de prescription est tellement riche en termes de concepts potentiels que les modèles obligent souvent à «trahir» la phrase originale lorsqu’elle est transcrite en format structuré. Le risque d’erreur nous fait privilégier le rendu plutôt que le structuré. La pensée magique de recourir à la norme d’échange HL7-FHIR n’est certainement pas la bonne voie. Il serait intéressant d’étudier en détails le script du NCPDP. Une étude de 2010 montrait qu’il avait des lacunes. Mais peut-être a-t-il évolué depuis 12 ans.

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