La gestion de banques de données sur les médicaments, par exemple celle d’un système d’information pharmacie, implique la définition d’une classification des médicaments dans cette banque, ainsi qu’une attention particulière à leur nomenclature.
La classification thérapeutique permet par exemple une affichage trié par classe de médicament ou l’extraction de rapports et de statistiques par classe. Les particularités de nomenclature, quant à elles, en plus d’assurer l’intégrité référentielle entre les systèmes et d’être importantes pour reconnaître les médicaments aux noms génériques obscurs (par exemple: carboxyméthycellulose sodique / gélatine / pectine…), servent à différencier les médicaments aux noms similaires (les LASA, « look-alike, sound-alike »).
Évidemment, les classifications et la nomenclature des médicaments d’un centre hospitalier devraient être conformes aux normes gouvernementales (Canada, Québec), réglementaires (OPQ, RAMQ), aux critères d’Agrément Canada et surtout, être uniformes à travers tous les systèmes informatiques et tous les documents papiers du centre. Ceci n’est pas une tâche facile !
Classifications
La classification thérapeutique internationale provenant de l’Organisation Mondiale de la Santé est la classification ATC (Anatomical Therapeutic Chemical). Les principes de classification sont disponibles sur le site web de l’OMS. Les classes peuvent être recherchées facilement par nom de molécule, et les DDD correspondantes sont disponibles dans le même index (voir par exemple la classification de l’anakinra).
Au Québec, l’INESSS et la RAMQ n’utilisent pas la classification ATC mais plutôt la classification américaine AHFS (American Hospital Formulary Service). La liste des médicaments – établissements de la RAMQ est élaborée avec celle-ci. Malheureusement, la classification AHFS n’est pas disponible gratuitement. Pour les médicaments qui n’ont pas été classés par la RAMQ, il est donc nécessaire de s’abonner à l’AHFS ou de tenter d’obtenir la classe par des moyens détournés (par exemple d’autres documents disponibles sur internet qui mentionnent la classe AHFS).
Une autre classification importante est celle des médicaments dangereux, exemplifiée par la fameuse liste du NIOSH américain. Au Québec, cette liste doit bien sûr être interprétée en gardant en tête les normes pour les préparations stériles dangereux et non-stériles de l’OPQ; la liste devrait également être adaptée au formulaire de chaque centre et aux pratiques en vigueur. Pour creuser davantage le sujet, voir une présentation de l’URPP (déclaration de conflit d’intérêt: je connais bien les auteurs). Les médicaments doivent être clairement identifiés dans la banque de données pharmacie et sur les documents générés à partir de celle-ci, notamment pour que personne ne se retrouve en situation de devoir manipuler un tel médicament sans prendre les précautions appropriées.
Encore une autre classification importante: celle des médicaments à haut risque, pour lesquels une erreur comporte un risque plus élevé de conséquences graves. En anglais, on parle de high alert medications. L’ISMP a émis une liste de ces médicaments en contexte de soins aigus et en pratique communautaire. Comme pour les médicaments dangereux, une liste locale doit être élaborée et appliquée aux banques de données sur les médicaments, de manière à ce que tous les systèmes et documents alimentés à partir de cette banque affichent l’information de haut risque, et que les différents professionnels (médecins, infirmières entre autres) comprennent bien de quoi il s’agit.
Nomenclature
L’exemple classique de modification à la nomenclature des médicaments visant à réduire les risques d’erreurs est le TALLman lettering, dont l’objectif est de différencier les médicaments LASA. Comme tout l’anglais dans la dernière phrase l’illustre, ces listes sont en général élaborées à partir des sonorités de la langue anglaise, et bien que l’orthographe des médicaments soit très proche, voire identique en français, la sonorité n’est pas nécessairement la même. Il serait intéressant qu’une liste similaire soit établie en prenant en compte le français. Ça pourrait donner une liste presque identique, mais je me demande ce qu’on pourrait trouver comme différences
Il existe plusieurs listes de médicaments pour lesquels l’écriture TALLman est recommandée, dont une provenant d’ISMP aux États-Unis, une d’ISMP Canada parue en octobre 2015, et une autre d’ISMP Canada ciblant l’oncologie. L’examen du formulaire local et des erreurs passées dans chaque centre peut évidemment mener à des variantes locales.
Avec les percées de la prescription électronique, et de la FADM électronique à venir au Québec, une autre stratégie sera à envisager et à évaluer: l’affichage « intelligent » des médicaments dans les listes, plutôt que par bête ordre alphabétique non filtré. Cela viserait à utiliser des stratégies pour trier, filtrer et différencier les affichages en listes de médicaments aux noms alphabétiquement proches, mais qui sont cliniquement différents, le tout pour éviter une erreur de sélection de médicament.
En bref
Un pharmacien qui doit tenir à jour une banque de données de médicaments dans un établissement de santé devrait selon moi avoir dans ses documents favoris:
- La liste établissement de la RAMQ et une copie (ou un abonnement en ligne) de l’AHFS.
- La liste NIOSH 2014 et son adaptation locale.
- La liste des médicaments à alerte élevée de l’ISMP et son adaptation locale.
- La liste TALLman de l’ISMP et les listes TALLman d’ISMP Canada, ainsi que leur adaptation locale.
Avez-vous d’autres sources de classification et de nomenclature à souligner ?