Impact de la documentation incomplète des allergies sur le délai de validation des ordonnances d’antibiotiques

Cette article rapporte une étude rétrospective réalisée dans un centre hospitalier situé à Philadelphie. Il n’y a pas d’autres détails fournis sur le centre en question. L’objectif de l’étude était de vérifier s’il existait une relation entre la rédaction d’une ordonnance d’antibiotique alors que les informations d’allergies étaient incomplètes, et le temps nécessaire pour valider cette ordonnance. Les ordonnances du d’octobre 2017 ont été incluses. Les auteurs ont aussi vérifié si la documentation complète des allergies était reliés aux interventions réalisées par les pharmaciens lors de la validation d’ordonnances.

138 ordonnances ont été incluses. 98 (71%) incluaient les détails des allergies. Les ordonnances avec détails d’allergies ont été validées 21 minutes plus rapidement (12 minutes par rapport à 33 minutes, p=0,02). Les pharmaciens ont dû intervenir à propos des allergies pour 19,4% des ordonnances incluant les détails d’allergies, comparativement à 35% des ordonnances sans détails d’allergies. Lorsqu’une ordonnance n’incluait pas le détail des allergies et nécessitait une intervention, le délai pour la validation était encore plus élevé, soit 82 minutes plus long.

Cette étude vient illustrer avec des données objectives un effet que tous les pharmaciens vivent quotidiennement: une ordonnances incomplète est toujours plus longue à valider, car il revient malheureusement au pharmacien d’obtenir l’information manquante alors que les intervenants pouvant la fournir (médecin, résident, infirmière) sont parfois non disponibles, difficiles à rejoindre ou carrément partis. En ce qui a trait aux allergies, les systèmes d’ordonnance électronique devraient permettre une documentation complète et signaler l’absence d’information pour les ordonnances qui le nécessitent.

Analyse des allergies documentées électroniquement

Cette courte lettre à l’éditeur décrit une analyse sommaire de la documentation des allergies dans les dossiers électroniques d’un hôpital universitaire espagnol. À noter, la documentation des allergies dans ce système était effectuée en texte libre. Un échantillon aléatoire de 530 dossiers médicaux a été sélectionné pour l’analyse afin d’obtenir des mesures précises à ±3% avec un intervalle de confiance de 95%.

La prévalence d’alertes d’allergies était de 8,3%, dont 88,4% concernaient réellement une allergie, et le reste d’autres informations. 83,3% des alertes d’allergies concernaient des médicaments, dont 30,7% des AINS et 26,1% des bêta-lactames. 35,1% des patients avec allergie documentée ont été référés à un allergologue, et 82,6% de ceux-ci ont eu des tests, qui se sont révélés positifs dan 60% des cas.

Faits intéressants à noter, les allergies ont été retirées du dossier dans 93% des cas où cette allergie a été testée négative. Pourtant, ces mêmes allergies ont été créées de nouveau dans 6,5% des cas, parce que le patient continuait de déclarer l’allergie.

Les auteurs déclarent par ailleurs vouloir introduire un système d’alerte n’étant pas en texte libre, afin de pouvoir intégrer cette information à l’aide à la décision.

Cette publication va dans le même sens que trois autres articles dont j’ai déjà parlé (1, 2, et 3). En particulier, le premier article propose une meilleure façon de définir et de coder les allergies dans les dossiers en élargissant la définition de ce champ, pour lier toutes les particularités liées à un médicament pour un patient en particulier, tout en documentant clairement la nature de la particularité. Ceci inclut les allergies, mais aussi les préférences, les intolérances, la pharmacogénomique, etc. L’avantage de cette approche est de limiter les situations où une fausse allergie est codée pour éviter de donner un médicament à un patient alors que la raison réelle n’est pas une allergie. Il est aussi important que ces tables prévoient des champs de longueur suffisante pour documenter les justifications des informations codées; trop souvent on se contente d’énumérer des médicaments auxquels le patient est « allergique » sans préciser des détails.

En ce qui a trait aux allergies qui sont réajoutées au dossier même après avoir été retirées, un autre article proposait d’ajouter une alerte électronique permettant de signaler une telle situation, on pourrait même forcer l’ajout d’une justification pour réactiver cette allergie.

Je crois que tous ces articles démontrent bien que l’approche actuelle face aux allergies dans les dossiers électroniques n’est pas la bonne et que tout ce système doit être repensé.