Ajustement des alertes d’aide à la décision avec les données d’utilisation

Plusieurs études supportent le suivi prospectif des alertes générées par les systèmes d’aide à la décision, et cette pratique se retrouve même dans les pratiques examinées par des organismes d’agrément. Une nouvelle étude de Nouvelle-Zélande décrit la démarche d’amélioration des alertes dans un système de prescription électronique à l’aide de plusieurs exemples. Le système est utilisé sur touts les unités de soins des hôpitaux publics d’une région de ce pays, à l’exception de l’urgence et des soins intensifs. Des données de 2016 à 2018 ont été extraites afin de montrer quatre exemples d’utilisation de données réelles pour améliorer la performance des alertes. Ce n’est pas un article révolutionnaire, mais il démontre bien l’utilité de ce processus. Voici les quatre exemples:

  • Les données d’utilisation de janvier à mars 2017 ont été analysées pour ajouter des alertes de doses élevées. Pour la spironolactone, par exemple, seulement 3% des prescriptions avaient une dose quotidienne de plus de 100 mg par jour. Considérant le risque d’erreur de 10x avec une dose de 12.5 mg, une alerte de dose élevée a été ajoutée à un seuil de 100 mg.
  • Durant une rupture de ceftriaxone, une alerte interruptive a été ajoutée et ceci a mené à une diminution significative des ordonnances pour ce médicament.
  • Des alertes ont été implantées en 2015 pour aviser les prescripteurs d’ordonnances multiples pour des combinaisons d’anticoagulants. Les données de août à décembre 2016 ont été examinées pour vérifier l’effet de ces alertes. Lorsqu’une alerte de ce type était générée, l’ordonnance était modifiée dans 6% des cas immédiatement, dans 22% des cas dans les 30 minutes et dans 4% des cas dans les 12 heures.
  • Suite à l’examen de données d’alertes sur le fentanyl entre janvier et juin 2017, il a été constaté que l’alerte visant à prévenir la prescription de timbres de fentanyl à changer plus fréquemment qu’aux 48h était déclenchée erronément lors de la prescription de toute ordonnance de fentanyl ne spécifiant pas de formulation précise. Étrangement, aucun commentaire à propos de cette alerte intempestive n’avait été reçu par les comités concernés. L’alerte a été révisée pour se déclencher avec la voie d’administration transdermique plutôt que la forme pharmaceutique de timbre. Le taux de faux positifs pour l’alerte est ainsi passé de 43% à 3%.

Données sur le suivi et l’enseignement au patient en 2018 dans les hôpitaux américains

Cet article, paru en juillet, poursuit la tradition annuelle du sondage de l’ASHP sur l’état de la pratique de la pharmacie d’établissement de santé aux États-Unis. Cette année, les données sur le suivi et l’enseignement au patient sont présentées. L’article a fait l’objet d’un épidose du podcast AJHP Voices.

Je parlerai uniquement ici des données concernant les technologies, mais gardez en tête que beaucoup plus de données sont disponibles dans l’article complet. La même méthode que d’habitude a été utilisée, avec un échantillonnage parmi l’ensemble des hôpitaux éligibles. Le taux de réponse était de 16,6% avec 811 hôpitaux qui ont répondu.

Tous les patients sont suivis par un pharmacien dans 33% des hôpitaux, et 47% utilisent une fonction d’analyse de données du dossier clinique informatisé pour identifier les patients à suivre. Les logiciels précis sont nommés dans l’article. Les plus gros hôpitaux étaient plus susceptibles d’utiliser un tel logiciel.

Pour la collecte des données nécessaires au suivi des patients, 75,2% des hôpitaux offrent à leurs pharmaciens une automatisation de la collecte dans le dossier clinique informatisé ou un logiciel de surveillance pour le suivi quotidien. Encore une fois, ceci était plus fréquent dans les plus gros hôpitaux.

Pour l’identification d’événements indésirables liés aux médicaments, 76,9% des hôpitaux ont un système d’alerte lors de la prescription d’un antidote, parmi d’autres stratégies.

Au sujet de la technologie d’assistance aux préparations magistrales, 16,4% des hôpitaux utilisent un logiciel de gestion des préparations, et ceci était plus fréquent dans les plus gros hôpitaux, avec 57,6% des hôpitaux de plus de 600 lits qui disposaient de cette technologie. Par rapport à 2017, on constate une augmentation du nombre d’hôpitaux utilisant la vérification du code-barre des ingrédients de préparation (26,9% à 31,6%), du nombre d’hôpitaux disposant d’un logiciel de gestion des préparations (12,8 à 16,4%), du nombre d’hôpitaux utilisant des photos ou des vidéos des préparations (12,5 à 14,1%), mais la proportion d’hôpitaux utilisant la gravimétrie est demeurée stable (5,5 à 5,4%). Toutes ces technologies étaient plus fréquentes dans les hôpitaux de plus grande taille. Ce qui me frappe particulièrement est que malgré tous ces chiffres, 59,9% des hôpitaux n’utilisaient aucune technologie pour les préparations stériles. Les barrières rapportées face à l’implantation de ces technologies sont listées, le coût étant l’obstacle le plus fréquent avec 77,8% des hôpitaux rapportant ce problème.

Parmi les données collectées et suivies par les département de pharmacie, on note des mesures de charge de travail et de productivité, les interventions cliniques des pharmaciens, des mesures d’inventaire, le temps de service des médicaments, le nombre de doses manquantes, et les erreurs de dispensation. On mesure aussi les niveaux d’utilisation des technologies, les contournements d’alertes de prescription électronique et des mesures d’utilisation des cabinets automatisés et des pompes intelligentes.

Parmi les données rapportées dans cet article, les choses que je souligne et qui sont aussi mentionnées dans la discussion sont les suivantes:

  • L’utilisation de fonctionnalités de collecte et d’analyse de données à partir du dossier clinique informatisé, pour le suivi quotidien des patients par des pharmaciens, est en place dans 75% des hôpitaux. On peut facilement s’imaginer comment ce genre de technologie peut améliorer l’efficience du pharmacien par rapport à une collecte manuelle, en particulier dans le contexte québécois où on doit lire des tonnes de documents manuscrits (souvent illisibles ou mal remplis) pour trouver l’information dont on a besoin.
  • L’utilisation de technologies d’assistance aux préparations magistrales, en particulier pour les préparations stériles, est en augmentation, malgré le fait que plus de la moitié des hôpitaux ne disposent d’aucune technologie, principalement en raison de leur coût élevé. Heureusement, les chiffres sont meilleurs pour les plus gros hôpitaux. Je continue de penser que les études cherchant à démontrer des bénéfices à ces technologies pourraient être meilleures, mais il demeure que je crois qu’elles deviendront incontournables à moyen terme.
  • Le suivi de mesures collectées à partir des systèmes informatiques utilisés par les pharmaciens et qui concernent les médicaments est en place dans la majorité des hôpitaux. Encore une fois, il est facile de voir comment l’obtention de métriques en temps réel peut aider les pharmaciens à optimiser leur travail et à documenter leur impact clinique.