ÉTATS-UNIS, ANALYSE DES CHAMPS EN TEXTE LIBRE DES PRESCRIPTIONS ÉLECTRONIQUES EN COMMUNAUTAIRE
Cette étude présente une analyse rétrospective des notes en texte libre dans les prescriptions transmises électroniquement à travers le système américain Surescripts, lequel traite 67% des prescriptions transmises électroniquement aux États-Unis en milieu communautaire. L’objectif était de caractériser le contenu du champ de texte libre dans ces ordonnances, et de vérifier si ce contenu était approprié.
Les ordonnances transmises durant une période de 7 jours, soit du 10 au 16 novembre 2013, ont été incluses. Un échantillonnage a été fait au hasard et les ordonnances ont été anonymisées; les ordonnances rendues incompréhensible par le processus d’anonymisation ont été exclues. Les ordonnances ont été analysées par 3 techniciens en pharmacie avec plusieurs années d’expérience, de manière indépendante, pour catégoriser les notes manuscrites en notes appropriées ou inappropriées. Les notes étaient considérées inappropriées par exemple si elles reprenaient l’information d’un champ dédié, si elles contenaient de l’information contradictoire ou de l’information inutile pour le pharmacien et le patient. Ensuite, les notes appropriées et inappropriées ont été classifiées selon le type de contenu.
20 260 395 ordonnances étaient dans la banque de données durant la période de l’étude. 14,9% (environ 3 millions) avaient des notes en texte libre. De celles-ci, 28 000 ont été échantillonnées, représentant 22 549 prescripteurs utilisant 492 logiciels de prescription différents. 1661 ont été exclues car elles n’étaient pas interprétables. L’échantillon final comptait 26 341 prescriptions avec notes en texte libre. 17 421 ont été classées inappropriées, soit 66,1% des notes. 7522 étaient appropriées, et 1398 étaient inutiles sans êtres inadéquates (« OK, thank you » par exemple).
Parmi les notes inadéquates, environ 31% étaient de l’information d’assurance, environ 24% une quantité à dispenser, et 19% des instructions posologiques. Ceci représente un risque potentiel pour le patient, par exemple une prescription de phénytoïne comportait une posologie dans les champs dédiés de 1 capsule le matin, mais une instruction en texte libre de 2 capsules le soir. Ceci requière un appel de clarification au prescripteur, mais cet appel peut prendre un certain temps. Entre temps, il est probable que le patient ne sera pas traité ou prendra une dose inadéquate. Dans les notes appropriées, environ 47% contenaient de l’information qui sera déplacée dans des champs dédiés dans des versions futures de la norme de communication, et 9,6% étaient des cessations pour lesquelles la norme de communication est actuellement en cours d’implantation.
États-Unis, alerte pour la détection des événements indésirables menant à l’administration d’antidotes
Cet article rapporte une initiative visant à améliorer la détection d’événements indésirables liés à l’utilisation des médicaments dans deux hôpitaux de soins aigus américains faisant partie de la même organisation. Le premier est un hôpital dédié à l’oncologie de 300 lits, le second un hôpital de soins cardiovasculaires de 150 lits.
Une revue de littérature a d’abord été menée pour établir quels traitement pharmacologiques avaient une valeur prédictive positive suffisante pour être considérés comme des indicateurs d’événements indésirables liés à la pharmacothérapie. Quatre médicaments ont donc été inclus: la naloxone, le fumazénil, la protamine et la vitamine K. À noter que l’administration dans les 24 heures de l’admission et à l’urgence était exclue, puisque dans ces cas le problème pouvait être dû à des circonstances externes et non aux soins donnés dans l’établissement. Trois phases d’intervention de 1 mois ont été prévues, avec à chaque phase un ajustement dans les interventions basées sur une analyse des cas détectés dans la phase précédente.
Initialement, l’administration d’un des médicaments indicateurs à un patient déclenchait une alerte automatique envoyée à travers le logiciel de dossier électronique à deux pharmaciens pour suivi; l’objectif était un suivi auprès du patient dans la journée de l’alerte, et autant que possible en temps réel. Après l’émission d’une alerte, chaque événement était révisé par deux pharmaciens et un médecin afin de le classer comme réel événement indésirable ou non. À la phase 1, l’émission d’une alerte était basée uniquement sur l’administration de l’un des quatre médicaments; tandis qu’à chaque phase subséquente des critères cliniques ont été ajoutés aux alertes pour tenter d’augmenter leur valeur prédictive positive (VPP)
À la phase 1, la VPP combinée des quatre médicaments était 0,33. Pour la phase 2, l’administration d’opiacés dans les 2 jours précédents a été ajouté comme critère pour la naloxone, et similairement de benzodiazépines pour le flumazénil ou d’héparine ou dérivés pour la protamine, de même que de warfarine dans les 5 jours, avec INR >1.3 et fonction hépatique normale pour la vitamine K. Cependant, la VPP combinée pour les 4 médicaments est passée à 0,21. Pour la phase 3, les restrictions d’administration de benzodiazépines pour le flumazénil et d’héparine pour la protamine ont été retirées, et les patients tachypnéiques avant l’administration de naloxone étaient exclus. La VPP dans cette phase est passée à 0,33. Spécifiquement par médicament, les VPP étaient de 0,47 pour la naloxone, 0 pour la phytonadione, 0,67 pour le flumazénil, et 0,33 pour la protamine.
Je trouve l’étude intéressante car elle montre comment on peut établir des alertes pour l’administration d’antidotes, en effet comme pharmacien clinicien si un patient dont j’ai la charge doit recevoir un tel médicament, je veux le savoir. Cependant, je trouve que les conclusions de l’études sont sans grande applicabilité externe; essentiellement le raffinement des critères cliniques pour augmenter la VPP risque de varier grandement en fonction de l’établissement, de ses pratiques et du paramétrage de son dossier électronique. Je crois que l’applicabilité de cette étude repose davantage dans l’analyse des événements indésirables au niveau administratif, pour la mise en place de mesures de prévention et de traitement, plutôt que dans le suivi clinique en temps réel.
États-Unis, alerte pour identifier les facteurs de risque d’abus de narcotiques
Cet article décrit le processus de développement et d’implantation d’une alerte dans un dossier médical électronique pour identifier les patients à risque de mauvais usage de médicaments narcotiques (opiacés et benzodiazépines) lors de la prescription. L’étude est disponible gratuitement en texte complet sur PubMed Central.
L’alerte a été développée dans une organisation de soins de santé américaine comprenant 40 hôpitaux et 34 urgences avec plus de 15000 prescripteurs. L’alerte a été développée dans 15 hôpitaux représentant environ 2500 prescripteurs parmi ceux-ci.
La première étape était d’effectuer une revue de littérature pour identifier les facteurs de risque associées au mauvais usages de narcotiques démontrés par des données probantes. Une équipe multidisciplinaire a ensuite révisé ces facteurs de risque pour décider de ceux à inclure dans l’alerte. Les données démographiques et les comorbidités ont été exclues car peu spécifiques. Les comportements à risque ont aussi été exclus car difficiles à objectiver à partir des données codées dans le dossier électronique. De même, les données subjectives ont été exclues.
Les critères suivant ont été programmés dans la première phase d’alerte:
- Une prescription active avec plus de 30% restant.
- 3 visites ou plus à l’urgence n’ayant pas mené à l’admission, avec traitement par opiacés sur place dans les 30 jours
- 3 prescriptions ou plus pour des opiacés ou des benzodiazépines dans les derniers 30 jours.
- Un diagnostic antérieur d’overdose.
- Un screening sanguin positif pour l’alcool, la cocaïne ou la marijuana.
L’alerte a été mise en place en mode « silencieux », c’est-à-dire sans apparaître aux cliniciens, durant un mois afin de valider sa programmation et de collecter des données en vue de la phase 2. Suite à cette phase, il a été déterminé que le seuil de 30% restant pour le premier critère était trop permissif, l’alerte apparaissant pour 17% des prescriptions, ce qui pourrait mener à une surcharge d’alertes. Le seuil a donc été modifié à 50%. Au contraire, le seuil de 3 visites à l’urgence ou plus avec opiacés a été jugé trop restrictif, n’apparaissant que pour 1,6% des prescriptions. Celui-ci a été modifié à 2 visites ou plus.
Une deuxième phase a eu lieu, toujours en mode silencieux, avec les nouveaux critères. Durant cette phase, 81 841 prescriptions ont été faites durant 61 747 rencontres de patients avec prescription. 9998 alertes « silencieuses » ont été générées, soit dans 1,3% de toutes les rencontres de patient face à face et 5,97% des rencontres avec prescription d’opiacé ou benzodiazépine. 62% des alertes étaient dans une population ambulatoire, et la majorité lors de visites à l’urgence. Malheureusement, l’article ne parle que très peu du déploiement réel de l’alerte, on ne peut donc pas conclure sur son impact en pratique. Cependant les auteurs concluent que selon eux l’alerte est adéquate et elle n’est pas trop fréquente.