Cet article est une mise à jour sur les ressources pour les ordonnances pré-rédigées que j’avais publiées à la fin août 2016. J’ai ajouté quelques articles pertinents sur le sujet trouvés depuis.
Une partie importante de mon travail est la gestion, la révision et l’approbation d’ordonnances pré-rédigées.
Quand on parle d’ordonnances pré-rédigées, on désigne un document établi à l’avance, électronique ou sur papier, présentant de manière structurée un groupe d’ordonnances reliées à une situation clinique, comme la prise en charge d’un problème de santé, la prescription d’un médicament complexe ou d’un protocole, qui a pour objectif d’orienter les prescripteurs vers les pratiques recommandées dans ce contexte et de diminuer les risques d’erreurs, par exemple en proposant des doses pour les médicaments et en clarifiant les critères d’utilisation. L’utilisation de ces documents est très populaire en établissement de santé.
En anglais, on parle de « order sets« , surtout dans le contexte de la prescription électronique. Bien sûr, dans le contexte québécois où la prescription électronique est encore à l’état embryonnaire, ces ordonnances pré-rédigées se retrouvent souvent sur papier. Néanmoins, plusieurs ressources disponibles, bien que conçues pour l’électronique, s’appliquent bien au papier.
Les avantages de ces documents sont évidents, je cite ISMP qui dit que les ordonnances pré-rédigées permettent:
- D’intégrer et de coordonner les soins en diffusant les meilleures pratiques.
- D’appliquer la médecine factuelle.
- De réduire la variation et les omissions non intentionnelles à l’aide d’une présentation standardisée et claire des ordonnances.
- D’améliorer les flots de travail en présentant des instructions claires, bien organisées et directement applicables aux systèmes en place de même qu’aux instruments d’administration des médicaments.
- De réduire le potentiel d’erreurs médicamenteuses à l’aide d’avertissements et de rappels intégrés.
- De réduire les appels aux prescripteurs pour clarifier des ordonnances imprécises.
ISMP souligne par ailleurs que des ordonnances pré-rédigées mal conçues, mal révisées ou mal maintenues peuvent contribuer à des erreurs, d’où l’importance d’avoir un processus clair pour la rédaction et l’approbation de ces documents dans un établissement. Je partage donc ici quelques ressources à ce sujet:
Lignes directrices
- Les lignes directrices d’ISMP sur la rédaction d’ordonnances pré-rédigées. Celles-ci s’appliquent autant au papier qu’à l’électronique. Il s’agit d’un excellent document et c’est le seul je connais qui est très précis au niveau des règles de rédaction, non seulement à propos du formatage et de la mise en page, mais également à propos des types d’ordonnances qui sont appropriées ou non, par exemple:
- Éviter les ordonnances multiples d’analgésiques, antiémétiques, laxatifs, antiacides, sédatifs, et autres par toutes les voies possibles pour couvrir tous les scénarios.
- Éviter les ordonnances conditionnelles (si ceci faire cela) qui transfèrent la responsabilité de décider si un médicament doit être donné à un autre professionnel que le prescripteur, sauf si les paramètres sont clairs et font partie du champ de pratique du professionnel concerné. Par exemple « débuter médicament x si diagnostic y » n’est pas adéquat si c’est l’infirmière qui se retrouve en position de décider si le patient a le diagnostic y pour débuter le médicament. Une ordonnance adéquate serait: « débuter antibiotique après avoir obtenu 2 hémocultures ».
- Éviter les ordonnances ambiguës et générales comme « reprendre médicaments habituels » ou « poursuivre médicaments pré-opératoires ». Je dois dire que c’est difficile de faire réaliser à plusieurs médecins que des ordonnances comme celles-là sont dangereuses !
- Les lignes directrices d’ISMP Canada sur les ordonnances pré-rédigées pour l’insuline sous-cutanée.
- À lire avant de réviser des ordonnances d’insuline !
Articles
- Un article paru dans Chest en janvier 2013 sur les bonnes pratiques pour les ordonnances pré-rédigées. Cet article a été écrit par une seule personne, mais il regroupe des recommandations de plusieurs références. Je trouve que les principes proposés dans cet article sont très bons, en particulier:
- Avant de débuter la rédaction d’une ordonnance pré-rédigée, de bien définir les objectifs visés, les problèmes à résoudre et les personnes responsables.
- Être attentif au possibilités de conséquences adverses inattendues d’une ordonnance pré-rédigée, par exemple si la prescription d’un médicament n’est pas claire.
- Bien réfléchir à la nomenclature des ordonnances pré-rédigées pour qu’elles puissent être retrouvées par la suite.
- Définir à l’avance si les éléments inclus dans l’ordonnance pré-rédigées doivent être fondés sur des preuves ou si l’inclusion de préférences de praticiens est envisageable… dans ma pratique je vois souvent des pratiques personnelles se frayer un chemin dans des ordonnances pré-rédigées, qui par la suite deviennent la « pratique standard », simplement parce que le document a l’air « officiel » !
- Un article de la revue Pediatrics qui décrit de manière détaillée les problèmes vécus par un hôpital pédiatrique de Seattle dans la gestion de ses ordonnances pré-rédigées et les changements mis en place pour les corriger.
- Les problèmes constatés à cet hôpital étaient:
- L’absence de responsables cliniques pour chaque ordonnance, causant des demandes contradictoires et des délais de mise à jour.
- L’absence de standardisation et de gouvernance.
- Un processus de révision informel et irrégulier.
- L’absence de maintenance et de mises à jour.
- Des demandes peu spécifiques de la part des cliniciens (par exemple, une demande pour une « ordonnance de gestion de l’anticoagulation »).
- Les solutions mises en place étaient:
- L’assignation de cliniciens responsables pour chaque ensemble d’ordonnances (« order set owners« ).
- Le développement d’un guide de rédaction standardisé.
- La mise en place d’un processus de révision multidisciplinaire avec documentation.
- L’ajout d’une phase de test dans le système informatique de l’hôpital afin de corriger les défauts avant le déploiement.
- La discussion de l’article est intéressante; elle détaille les points positifs et négatifs de la démarche effectuée dans cet hôpital.
- Les problèmes constatés à cet hôpital étaient:
- Un article de Health Care Quarterly sur la formalisation du processus de développement des ordonnances pré-rédigées. je trouve cet article pertinent car il illustre bien les gains réalisés en partant d’un système de rédaction informel à un processus structuré.
Ressources en ligne
- La section sur les ordonnances pré-rédigées du wiki HIMSS-CPOE. Ce site web vise surtout la prescription électronique mais comporte une section de fichiers avec des ressources intéressantes provenant d’hôpitaux américains.
- Une revue systématique de la littérature sur les ordonnances pré-rédigées. Ce document, réalisé dans le cadre du système de santé ontarien, date un peu (2009) mais il propose une analyse systématique de la littérature publiée jusqu’à ce moment avec des recommandations pour une mise en pratique fondée sur les preuves.
Si vous connaissez d’autres ressources utiles, n’hésitez pas à les partager dans les commentaires.